Les requins en Méditerranée

On les imagine plutôt dans les eaux chaudes d’un lagon ou rodant le long d’une plage de sable blanc quelque part sous les tropiques.

Publié le 18/05/2021

Pourtant on ne compte pas moins d’une cinquantaine d’espèces de requins dans les eaux de l’hexagone ! Pour s’en convaincre, il suffit de partir à leur recherche le long des côtes françaises. Une occasion inespérée de faire quelques rencontres surprenantes. Allez, on embarque ?

Article-requins

Avant de continuer, nuançons un peu notre discours. Les requins de nos côtes sont cependant rares à l’observation. Les individus qui évoluent à portée de palmes sont en réalité de taille assez réduite, alors que les requins pélagiques, à qui vous pensez sans doute en parcourant cet article, sont quant à eux observables lors de croisières par exemple, ou bien lors d’expéditions à thématiques « squales » ou « cétacés ». Cependant, tous ces requins sont bien là, dans la Grande Bleue ! 

Observer-Roussette-Mediterranee

Tout d’abord, certaines espèces seront là, tapis dans l’ombre des épaves ou des tombants sous-marins. Une poignée de requins guettent d’un œil attentif les plongeurs qui viendraient leur tirer le portrait. Peu commun à des profondeurs réduites, vous ne les apercevrez jamais en snorkeling (bien malheureusement), mais plutôt lors de plongée en milieu sombre, à partir de 35 mètres de profondeur. Dans cette typologie de lieu, vous pourrez découvrir la roussette, le plus petit requin de nos côtes mais peut être le plus séduisant aussi. Ce dernier a un physique particulièrement évocateur, avec une belle robe tachetée et des yeux dorés dotés d’un regard de chat particulièrement expressif. D’ailleurs, on le nomme aussi « chien » ou « chat » des mers. D’abord timide et craintive, cette espèce se laisse par la suite approcher très facilement pour peu que vous fassiez preuve de patience et de respect. Avec un appareil photo, vous pourriez remonter avec un cliché des plus saisissants ! Bien qu’essentiellement nocturne pour les moments de chasse, ce requin peut avoir une activité diurne et vous offrir un très beau moment plongée. 

Requin-Pelerin-Mediterranee

Découvrons maintenant un autre requin qui croise le long de nos côtes. Loin, très loin, de la taille réduite de la roussette, vous pourriez bien observer en surface, lors d’une traversée au large, l’impressionnant et très massif requin pèlerin. Cet étonnant visiteur, plus commun sur la côte Atlantique qu’en Méditerranée, est un vrai géant de mers, pouvant mesurer jusqu’à 12 mètres de long pour un poids avoisinant les 4 tonnes. Cela fait de lui la seconde espèce de squale la plus grande de la planète, juste derrière le requin baleine, et le plus grand de Méditerranée. Tout comme son grand cousin, le requin pèlerin est un grand gentil. Absolument inoffensif pour l’homme, il passe la plupart de son temps à se nourrir de plancton, la gueule grande ouverte, telle une épuisette qu’il passe et repasse afin de filtrer l’eau de mer. Des semblants de peignes tapissent l’intérieur de son impressionnante mâchoire et retiennent les petits organismes qui constituent sa nourriture principale. Cette espèce encore largement méconnue reste pour l’instant un mystère quant à son mode de vie et de reproduction. Ce que l’on sait de lui aujourd’hui : un individu est capable de filtrer toutes les heures l’équivalent d’une piscine Olympique, soit 300.000 litres d’eau ! Plutôt bluffant non ? 

Plonger-avec-requin-bleu

Toujours au large, il est également possible d’observer en Méditerranée de beaux requins peau bleue escortés par quelques poissons pilotes. Cette espèce essentiellement pélagique peut être observée parfois près des côtes mais cela est relativement rare (les seuls cas concernent des femelles pouvant mettre bas dans des ports ou encore une activité d’opportuniste dans les ports de pêche). Tout comme le requin pèlerin, le requin peau bleue ne fait pas partie des espèces que vous pourriez redouter de croiser lors d’une plongée ou bien d’une baignage. Si vous le croisez un de ces jours, vous pourrez l’identifier facilement avec sa forme très effilée et par la teinte bleue de la partie supérieure de son corps. Cependant, on l’accorde aux novices, sa taille maximale avoisinant les 4 mètres ainsi que ses belles rangées de dents peuvent le rendre assez intimidant. Saviez-vous que la gestation du requin peau bleue dure un an ? Les femelles sont vivipares et les jeunes atteignent leur taille adulte à l’âge de 4 ans, une croissance exceptionnellement rapide ! Avec ses grandes pectorales et son caractère relativement calme, ce requin est malheureusement victime de la surpêche et des prises accessoires dans la plupart des océans du globe, nous aimerions tellement que cela change <3 ! 

Requin-renard-France

Quelle autre espèce ajouter à la liste de ces rencontres déjà exceptionnelles ? Toujours au large, vous pourriez avoir la chance de tomber nez à nez avec un requin renard ! Et oui, bien que les Philippines soient le spot le plus connu pour rencontrer ce magnifique requin (à Malapascua plus exactement), il est également possible de croiser la route de cette espèce au large de nos côtes. Cependant, contrairement au fameux spot de la mer de Visayan, il n’y a pas de véritable lieu de rendez-vous pour rencontrer le timide requin renard. Les observations se font très aléatoirement au large. Tout comme à l’autre bout du monde, le renard de nos côtés peut atteindre une taille considérable, jusqu’à 6 mètres, dont la moitié de la longueur peut être attribuée à sa queue démesurée en forme de faux. Une fois n’est pas coutume, le requin renard ne représente aucun danger pour l’homme, au contraire, il évitera toujours la confrontation avec l’homme et ne viendra pas s’approcher des plongeurs ou des baigneurs. Ce n’est pas véritablement un requin de surface non plus donc dites-vous que si vous le croisez un jour au large de nos côtes, vous êtes très très chanceux !

Requin-blanc-Mediterranee

Allez, terminons cette exploration par une petite note de frisson ! Des dents, une taille considérable et une réputation non méritée. Oui, nous parlons bien du requin blanc ! En vérité, il est installé en Méditerranée depuis très longtemps, et plus précisément depuis 3.2 millions d’années ! On estime qu’en tout, ils doivent être à peu près une centaine d’individus à évoluer au large et surtout dans les profondeurs. Pourtant, la mâchoire la plus célèbre du cinéma est aujourd’hui rarissime à observer en Méditerranée. Selon les observations faites depuis plusieurs décennies et même depuis l’antiquité, on a pu observer que le grand blanc de chez nous possède une coloration plus marron clair que celle du gris-noir des espèces d’Australie, d’Afrique du Sud et de Californie. Aussi, il a un comportement alimentaire différent de celui des zones géographiques précédemment citées, avec une adaptation alimentaire plus méditerranéenne : chasse aux thons et aux marlins plutôt qu’envers les mammifères marins, devenus chez nous extrêmement rares comme le phoque moine, quasiment absent des eaux occidentales du bassin méditerranéen. 

Plonger-avec-requins-Mediterranee

Vous l’avez saisi en parcourant cet article, la rencontre avec les requins en Méditerranée n’est pas ce à quoi elle peut s’apparenter dans les zones tropicales où certains points chauds sont identifiés et permettent de quasiment assurer l’observation de telle ou telle espèce. Pourquoi ? Car les requins de la Grande Bleue sont des animaux qui migrent beaucoup, ils se déplacent énormément, que ce soit pour la recherche de leur nourriture ou bien pour la reproduction. Avec un cycle de vie long et une population qui se met en place sur plusieurs années jusqu’à l’atteinte de la maturité sexuelle, il est constaté que les individus en Méditerranée sont d’autant plus en danger et certaines espèces sont considérées comme en voie de disparition. Dans ces perspectives, la rareté de l’observation des squales et l’absence de réelle zone de « rendez-vous » nous semble plutôt être un point positif, qu’en pensez-vous ;) ?