5 espèces qui vont vous faire cauchemarder

La diversité sous-marine que nous affectionnons tant nous donne parfois quelques frissons et étonnements (et nous adorons ça).

Publié le 26/10/2022

Que ce soit à cause des « on-dit » ou de certaines caractéristiques notables, comme la grandeur, la mâchoire, les talents de chasse ou encore le mimétisme, quelques rencontres viennent avec leur lot de surprises. Eh oui, l’esthétique des poissons que l’on découvre joue sur notre ressenti et c’est tout à fait normal. L’être humain est doté de facultés lui permettant d’assimiler une apparence à un signal « danger » ou « ne pas toucher ». Également, dans la nature, certaines espèces de grenouilles aux couleurs éclatantes se servent de leur palette comme d’un signal auprès des éventuels prédateurs, « ne me mangez pas, je suis toxique ». Ainsi, il en va de même pour notre propre interprétation de ces signaux, sachant d’autant plus que l’être humain n’est pas véritablement à sa place naturelle et dans son élément sous l’eau. Ne rougissez plus, un petit frisson au cours d’une plongée est tout à fait normal et ce dernier pourrait bien se faire ressentir lors d’une rencontre avec l’une des espèces suivantes...

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Allez, on prend son courage à deux mains ! Plongez avec Subocea à la découverte de cinq espèces aux physiques bien singuliers. Aspect chimérique, mâchoire démesurée, prédateur tapis dans l’ombre... ces poissons vont vous faire froid dans le dos, Happy Halloween ! 

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La murène zébrée

Débutons notre découverte du cabinet des curiosités par une espèce digne du film Beetlejuice : la murène zébrée ! Elle porte bien son nom avec ses magnifiques zébrures verticales claires (blanches, crème ou jaunes) parsemées sur sa peau couleur chocolat. Cette murène au corps serpentiforme de 50 à 150 centimètres (bien qu’elle excède rarement les 100cm) est surprenante car elle ne possède ni écailles, ni nageoires. Les nageoires anales, caudales et dorsales sont comme rassemblées en une crête de peau continue qui lui traverse le corps. Le plus étonnant de son corps serpentiforme : une nageoire caudale se terminant en pagaie.

Ses dents similaires à des molaires sont ultra résistantes et positionnées au bout d’un museau court et retroussé, rappelant la bouche édentée d’une grande mère (sympa...). Ces dernières lui sont bien utiles pour broyer les coquilles dures de ses proies : crabes du genre Xantho, crustacés, oursins et parfois mollusques. Cependant, n’ayez crainte, contrairement aux espèces du genre Gymnothorax qui garde la bouche ouverte avec de belles dents tranchantes apparentes, la murène-zébrée garde la plupart du temps la gueule fermée, quand bien même elle serait ouverte, ses dents ne sont pas perceptibles, en voilà une bonne nouvelle ! 

Telle un fantôme, la murène zébrée vit majoritairement en solitaire, cachée dans les zones rocailleuses, les récifs coralliens et fonds sablonneux où elle s’aventure la nuit, bien que rarement, à la recherche de nourriture. Elle apprécie se terrer dans des failles et anfractuosités profondes, de 3 à 50 mètres car elle est particulièrement craintive la journée. Vous pourrez noter en plongée qu’il arrive que plusieurs murènes zébrées se retrouvent à partager le même abri. 

En termes de reproduction, des études disent que la murène zébrée serait hermaphrodite protogyne, en d’autres termes qu’elle changerait de sexe pour passer de femelle à mâle. Vous pourrez rencontrer cette espèce atypique dans la toute la zone Indopacifique, ça en fait des éventuelles rencontres ! Sa large aire de répartition devrait jouer en votre faveur alors soyez bien attentif aux sombres recoins où elle pourrait se cacher ! 

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Le poisson-crocodile

Nous ne parlons pas là d’un reptile mais bien d’un poisson qui porte le même nom que le redoutable prédateur ! Nous allons voir que les deux espèces ont des similitudes et qu’il n’est pas anodin que cette appellation soit utilisée pour désigner Cymbacephalus beauforti, autrement dit « poisson-crocodile de Beaufort ». 

Le poisson crocodile est un poisson à tête plate et comprimée. Au milieu de celle-ci, un museau et une bouche en forme de bec de canard avec des lèvres épaisses en forme de V, des yeux globuleux avec un pic en guise de sourcil. Tant de caractéristiques qui font de ce physique bien particulier une curiosité à ajouter à nos espèces d’Halloween. Au-dessus de sa tête se trouve des crêtes osseuses et des épines qui donnent à ce corps comprimé un relief permettant de le repérer sur les fonds marins. Son apparence globale est accentuée par les nageoires dorsales, pectorales et pelviennes larges et tachetées (qui devraient pour le coup vous aider à l’apercevoir assez facilement). La couleur du poisson crocodile n’est pas des plus colorées mais elle lui est bien utile pour se camoufler efficacement. Des taches brunes, marron et verdâtres mêlées à des lignes bleues dessinent la robe de ce poisson d’une trentaine de centimètres en moyenne (dont certains spécimens atteignent tout de même une cinquantaine de centimètres). La livrée du poisson change de couleur au fur et à mesure qu’il grandit. Celle des juvéniles est noire parsemée de blanc tandis que celle des adultes peut changer directement en fonction de l’environnement. Ceci est un avantage considérable pour ne pas se faire repérer par les prédateurs tout en pouvant chasser tranquillement. Souvent tapis dans le sable, seuls ses yeux sont hors du sol, une technique idéale pour débusquer les petits poissons. Afin d’adapter au mieux sa vision, le poisson crocodile dispose d’un filtre de lumière, une adaptation à la chasse qui fait de lui un grand prédateur des zones coralliennes.  

A ce titre, le poisson-crocodile vit principalement près des récifs coralliens, sur le sable et sous une dizaine de mètres de profondeur, rarement plus (généralement 2 à 3m). Il est commun aux zones tropicales du centre du bassin Indopacifique et de la mer Rouge mais est aussi visible... en Méditerranée ! Il a emprunté le Canal de Suez et a été observé en Méditerranée orientale à deux reprises !

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Le congre

Passons à une troisième espèce à la beauté Ô combien particulière : le congre. Issu de la famille des Congridae, le congre est un poisson aux éléments bien distinctifs : un corps très allongé, couvert d’un mucus visqueux semblable à l’anguille ou la murène. Sa bouche renferme une mâchoire puissante avec des incisives longues et fines capables de briser les carapaces de crustacés, cachée par des lèvres épaisses s’étirant derrière ses yeux. Les trois nageoires dont il dispose, dorsale, anale et caudale, sont rassemblées en une seule et même nageoire, se formant à partir du niveau des pectorales. Ne cherchez pas de nageoires pelviennes, le congre n’en a pas ! Le congre a un dos brun qui contraste avec son ventre gris clair tendant vers le blanc. La longueur de ce poisson est de deux mètres mais peut atteindre jusque trois mètres, tout ça pour un poids oscillant entre 10 et 60 kilogrammes. 

Dernière caractéristique notable du congre : sa reproduction. Le congre est ovipare et atteint la majorité sexuelle vers 5 ans, voire jusqu’à 15 ans, ce qui est très tard dans le monde sous-marin ! Pour pallier ce « manque » de reproduction, la femelle est capable de pondre jusqu’à 8 millions d’œufs. Notons également que le congre ne peut se reproduire qu’une seule fois au cours de sa vie car, après l’acte charnel, celui-ci dépérit. Sa longévité est donc courte et varie en fonction de l’âge de reproduction. On sait peu de chose à l’heure actuelle sur la reproduction du congre, cependant, il est certain que l’espèce effectue une migration dans l’océan pour se reproduire, on dit que c’est donc un poisson océanodrome. Un lieu de réunion entre reproducteurs serait connu aujourd’hui :  l’archipel des Açores

Pendant sa vie, le congre passe la majorité de son temps caché en journée et sort essentiellement la nuit pour chasser. Il se nourrit de poissons tels des tacauds, des crabes, des céphalopodes comme des sèches et des pieuvres, ainsi que d’homards. D’ailleurs, connaissez-vous l’histoire du congre et du homard ? 

On raconte que dans les profondeurs des océans, certains congres et quelques homards partagent le même abri qu’ils affectionnent pour son emplacement stratégique ou sa surface suffisamment grande pour les accueillir simultanément. Tout comme de plus petites espèces exotiques (comme le gobie et la crevette pistolet), ces deux-là peuvent entretenir ce qui pourrait ressembler au premier abord comme une symbiose, cependant l’histoire n’est pas si rose et respectueuse qu’on voudrait nous le faire croire. En effet, homard et congre possèdent un caractère bien trempé et des moyens de défenses redoubles : pinces pour l’un et dents acérées pour l’autre. C’est ainsi que la cohabitation peut facilement tourner au vinaigre : certains congres trop imprudents ou de petit taille ont été taillés en pièces par de puissants décapodes. Ceci dit, l’histoire raconte aussi que le congre a plus d’un tour dans son sac et un esprit affuté. Oui et alors ? Eh bien le congre a tendance à prendre soin de son colocataire et à lui laisser volontiers des bouts de ses festins à disposition. En mettant à disposition une nourriture conséquente, le congre fait en sorte de générer une mue du homard, qui n’a pas d’autre choix que de changer de carapace pour se sentir à l’aise face à sa prise de poids. C’est à ce moment-là que le congre montre son vrai visage : il profite de la période de mue, synonyme de fragilité et de vulnérabilité pour le homard, afin de fendre sur son collataire et le secouer dans tous les sens dans sa gueule peu amicale jusqu’à ce que le pauvre homard soit réduit à néant. Une histoire sordide et pourtant vraie ! 

Pour observer ce grand prédateur, rendez-vous dans les fonds rocheux entre 0 et 300 mètres de profondeur. On retrouve le congre plus largement en mer du Nord – au large des côtes norvégiennes et Islandaises – dans l’océan Atlantique jusqu’au Sénégal et en Méditerranée. Pas besoin de sortir de l’Europe pour l’admirer. Ceci dit, pour mettre toutes les chances de votre côté, choisissez l’Espagne comme destination plongée, vous pourriez l’apercevoir à coup sûr.  

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La rascasse de Merlet

Horrifique, du nom à l’apparence, un descriptif qui va bien à la rascasse de Merlet. On vous explique le pourquoi du comment !  

La rascasse de Merlet est un poisson de genre Rhinopias. Ce qui est étonnant, à première vue, c’est que d’apparence, nul ne pourrait croire qu’il s’agit ici d’un poisson. Et pour cause, il possède un corps comprimé latéralement avec une quinzaine d’excroissances sous la mâchoire et des lambeaux cutanés sur l’intégralité de son corps. Ses nageoires effilées lui donnent une apparence semblable à une grosse algue généreusement fournie. D’ailleurs, sa nageoire dorsale est atypique : elle a 12 rayons épineux puis 9 rayons mous. La tête volumineuse de la rascasse de Merlet est caractérisée avant tout par une grande bouche proéminente recourbée vers le haut, disproportionnée par rapport à la taille de son corps, de hauts yeux, facilement détectables grâce aux tâches blanches situées en leur dessous, avec un appendice dentelé et branchu. La rascasse de Merlet atteint généralement vingt-cinq centimètres de longueur. Sa couleur varie du jaune au rouge en passant par du brun ou encore du noir. Les dessins sombres en labyrinthe visibles sur son corps appuient le fait qu’elle s’apparenterait presque à des algues ou tout autre organisme végétal. Mauvaise nageuse, la rascasse de Merlet bouge peu et se recouvre d’algues et de micro-organismes pour se protéger (elle est tellement statique que des végétaux peuvent se développer sur son corps !). Lorsqu’elle se décide à se déplacer, elle s’aide de ses nageoires pectorales et bondit, ou se dandine, pour aller d’un point A à un point B, rien de plus aventurier.

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Son apparence feuillue laisse à penser que la rascasse de Merlet se camouflerait parmi les algues. Mais ce n’est pas le type d’environnement dont le poisson raffole. Eh oui, la rascasse de Merlet privilégie les coraux. Il est donc très facile d’en apercevoir une lors d’une plongée dans la zone Indopacifique. L’espèce est facilement observable en mer de Corail et dans les eaux claires aux alentours de la Nouvelle-Calédonie, en Papouasie-Nouvelle-Guinée et à l’est de l’Australie. On la retrouve dans une profondeur oscillant entre 5 à 30 mètres, là où évoluent de nombreux mollusques, crustacés et poissons dont elle se nourrit. Tout comme le reste des Rhinopias, elle chasse majoritairement la nuit à l’aide de sa grande bouche, prête à gober les proies passant à sa proximité. 

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Le pégase 

Notre zoom sur ces 5 espèces prend fin par une touche de beauté et d’étrangeté avec le surprenant Pégase, aussi appelé petit poisson-dragon. Son nom rêveur n’est pas dû à un physique forcément gracieux mais à ses larges nageoires pectorales bleues aux bordures blanches, similaires aux ailes des créatures mythologiques. Notons d’ailleurs que ce sont uniquement les couleurs des nageoires qui sont éclatantes. Le reste du corps a, quant à lui, une apparence rocailleuse. Le pégase possède un corps à plaques osseuses beige et marron, comme les poissons coffres, ce qui leur est très utile pour se camoufler dans le sable des fonds marins. La trompe située au bout de sa tête ainsi que ses larges nageoires pectorales et sa nageoire caudale translucide lui donnent une allure majestueuse,. Ceci dit, contrairement à ce que pourrait le laisser croire notre descriptif, le pégase n’excède pas les 10 centimètres de long ! 

On trouve l’espèce en mer Rouge, au large des côtes de l’Afrique, dans l’océan Indien ainsi que dans l’océan Pacifique, du Japon à l’Australie en passant par la Polynésie française et la Nouvelle-Calédonie. C’est un poisson qui apprécie les eaux tropicales, les herbiers et les fonds sableux et détritiques où vers et petits crustacés prolifèrent. Il se déplace régulièrement en longeant le sol et s’enterre quelques fois dans le sable pour se protéger d’un danger ou pour chasser de minuscules proies. Il est particulièrement intéressant de pouvoir l’approcher lors d’une plongée en muckdiving, donc sur un fond marin sombre, afin d’en observer toute l’étrangeté de son corps cuirassé et son apparence vraiment atypique, lui donnant l’apparence d’une vie quasi extraterrestre. Pour mettre toutes les chances de votre côté pour l’observer, direction Sulawesi, le temple de la plongée muckdiving ! 

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À travers ces cinq espèces sous-marines plus ou moins inquiétantes, nous avons pu voir que le physique n’est pas l’attrait premier de chaque poisson, au contraire. Comme on dit chez nous, l’habit ne fait pas le moine et la laideur peut (bien) servir pour se protéger de ses prédateurs ou à des fins de chasse. La diversité physique et comportementale de chaque espèce rend la plongée d’autant plus inspirante, unique et exceptionnelle. A travers d’autres articles, découvrez d’autres espèces atypiques et poissons experts du camouflage